La protection des créations culinaires : un sujet brûlant

Alors que les offices français et européens refusent de protéger les saveurs (ou les odeurs) à titre de marque et que la CJUE avait fermé la voie du droit d’auteur par son arrêt du 13 novembre 2019 (aff C 310/17), 22 députés ont déposé, le 30 avril 2019, une proposition de loi relative à la protection des recettes et créations culinaires.

Aujourd’hui, les recettes de cuisine dans leur expression littéraire peuvent être protégées par le droit d’auteur, l’esthétique de la création peut faire l’objet d’un dépôt de modèle, les techniques innovantes mises en œuvre lors de la réalisation de la création peuvent donner lieu à une protection par brevet et le nom de la création peut-être déposé à titre de marque.

Mais la création culinaire en elle-même reste vulnérable et la seule solution viable aujourd’hui est le secret de la recette, dont la violation peut être sanctionnée (cf Coca Cola, KFC, Nutella etc).

Cette situation ne convient toutefois pas à tous, tant la conservation d’un secret est contraignante et la protection incertaine.

La proposition de loi du 30 avril 2019 propose donc la création d’un Institut National de la Création Culinaire Certifiée,  habilité à délivrer des « certificats de création culinaire » pour protéger, pendant 20 ans, les créations culinaires :

  • nouvelles, c’est-à-dire jamais rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de certificat de création culinaire par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen.
  • impliquant une « activité créatrice », définie comme une non-évidence pour l’homme du métier
  • présentant un « caractère gustatif propre » pour donner une impression d’ensemble de « non déjà gouté ».

Le créateur ou titulaire d’un certificat de création culinaire jouirait de droit patrimoniaux (droit exclusif d’exploitation transmissible et susceptible de licences) et moraux (droit de divulgation, droit au nom, droit au respect de la création culinaire).

Les créations culinaires seraient ainsi inscrites sur un registre national public, reprenant très certainement les ingrédients, la recette et tous les éléments permettant aux tiers de reproduire la recette.

Le texte prévoit également l’existence d’un régime spécifique pour les créations des salariés, une procédure d’opposition et bien entendu, la possibilité d’agir en contrefaçon.

Cette proposition de loi semble penser à tout, tirant les enseignements des difficultés rencontrées dans les autres régimes dont elle s’inspire largement, en particulier le droit d’auteur, les dessins et modèles et les brevets.

Elle pourrait donc séduire certains professionnels, particulièrement dans le domaine de l’industrie agroalimentaire. Néanmoins, elle permet l’accès par tous aux recettes particulières faisant la renommée de leurs créateurs, lesquels ne pourront faire valoir un monopole que pendant 20 ans.

La décision de recourir ou non à ce certificat devra donc être mûrement réfléchie en amont… si tant est que cette proposition de loi devienne un jour une loi.

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