[Blog] MONASTERY : Distinctivité et théorie des faits notoires » de l’ EUIPO
Le 17 janvier 2024, Ellen & Reiko Inc. a demandé l’enregistrement en UE de la marque "MONASTERY" pour des produits des Classes 3 (produits de soin et cosmétiques), 18 (sacs), 21 (brosses, peignes), 24 (serviettes) et des services des Classes 35 (services de vente au détail) et 44 (services de spa et de beauté). L'examinateur a émis un refus provisoire partiel, arguant que le terme "MONASTERY" était descriptif (Article 7(1)(c) EUTMR) et dépourvu de caractère distinctif (Article 7(1)(b) EUTMR). Il soutenait que le public pertinent comprendrait le signe comme décrivant le lieu de production des biens ou de prestation des services, car les monastères sont connus pour produire des biens et des services. Le dictionnaire Collins définissait "monastery" comme la résidence d'une communauté religieuse. L'examinateur a également cité des exemples de produits monastiques vendus en ligne (cosmétiques, sacs, serviettes, etc.).
L’EUIPO peut utiliser des faits notoires pour fonder son raisonnement pour apprécier notamment la distinctivité d’une marque. Les faits notoires sont ceux qui sont susceptibles d’être connus par quiconque ou qui peuvent être connus par des sources généralement accessibles (notamment TUE 16/10/2014, T‑444/12, Linex). Or, c’est en recourant à cette théorie des faits notoires que la division d’examen de l’EUIPO avait considéré que le terme « MONASTERY » (monastère en français) était descriptif et dépourvu de caractère distinctif pour les produits et services précités.
Le 20 août 2025, la quatrième Chambre de recours de l'EUIPO a annulé la décision de première instance. La Chambre a estimé que le terme "MONASTERY" n'était ni descriptif ni dépourvu de caractère distinctif. Elle a souligné que les pratiques des monastères proposant de tels produits ou services sont limitées et peu connues du public pertinent. Les preuves de l'examinateur ont été jugées insuffisantes pour établir une association directe, et la Chambre a refusé d'étendre la connaissance historique des activités des monastères (telles que la production alimentaire ou artisanale) aux cosmétiques sans justification concrète.
La Chambre de recours recadre ainsi la division d’examen qui s’était retranchée, au fil des échanges avec le déposant, derrière de prétendus faits notoires faute de preuves suffisantes pour justifier la prétendue descriptivité et absence de distinctivité du terme MONASTERY pour les produits en cause. Les faits notoires constituent une arme puissante de l’EUIPO pour asseoir ses raisonnements mais la chambre de recours le rappelle ici, il faut savoir raison garder dans leur application.