Les juridictions allemandes prises de vitesse par Ferrari

Par Justine Salzenstein,

Dans un communiqué de presse datant du 2 décembre 2014, Ferrari a présenté pour la première fois au public sa nouvelle voiture de sport FXX K, destinée uniquement à être conduite sur circuit et produite en nombre très limité.

Ce communiqué comportait deux photographies montrant notamment une vue frontale du véhicule qui est composée du capot dont la forme représente un V et d’un pare-chocs intégrant un spoiler avant à deux couches. Selon Ferrari, cette partie serait perçue comme un tout définissant les « traits de visage » spécifiques à ce véhicule et ferait également penser à un avion ou à une voiture de Formule 1.

Ferrari 1

La société allemande Mansory Design, qui est spécialisée dans la personnalisation de voitures haut de gamme, produit et commercialise des « kits de tuning » destinés à modifier l’apparence de la Ferrari 488 GTB, un modèle de route produit en série, de manière à la rapprocher de celle de la nouvelle FXX K.

En mars 2016, lors du salon international de l’automobile de Genève, Mansory Design a présenté un véhicule ayant subi cette transformation sous le nom de « Mansory Siracusa 4XX ».

Ferrari 2

Ferrari estime que la commercialisation par Mansory Design de ces « kits de tuning » constitue une violation des droits qui lui sont conférés par un ou plusieurs dessins ou modèles communautaires non enregistrés dont elle est titulaire, portant sur la partie frontale de son nouveau modèle (FXX K).

Devant le tribunal régional de Düsseldorf, Ferrari a revendiqué le fait que son droit sur le dessin ou modèle communautaire non enregistré portant sur la partie frontale était né lors de la publication du communiqué de presse le 2 décembre 2014.

Débouté en première instance, Ferrari a également vu son appel rejeté par l’Oberlandesgericht Düsseldorf au motif que le dessin ou modèle communautaire revendiqué, relatif à la partie de la Ferrari FXX K, n’a jamais existé car Ferrari n’a pas démontré que l’exigence minimale d’une certaine autonomie et d’une certaine complétude de la forme était satisfaite.

Ferrari a alors formé un recours en révision devant le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice allemande) qui a estimé que l’issue de ce dernier dépend de l’interprétation du règlement sur les dessins et modèles No.6/2002. Il s’agit en effet de déterminer dans quelles conditions l’apparence d’une partie de produit (celle revendiquée par Ferrari sur une partie du modèle FXX K), peut, conformément à ce règlement, bénéficier d’une protection en qualité de dessin ou de modèle communautaire non enregistré.

La Cour a donc posé deux questions à la CJUE :

  1. La divulgation/publication de l’image d’un produit dans son intégralité, peut-elle faire naître une protection au titre des dessins ou modèles communautaires non enregistrés sur certaines parties de ce produit, prises indépendamment ?
  2. Si tel est le cas, afin de pouvoir être protégée au titre de dessin ou modèle communautaire, l'apparence d'une partie de produit doit-elle présenter une « certaine complétude » et une « certaine autonomie » par rapport à l'apparence d'ensemble du produit ?

Dans un arrêt du 28 octobre 2021, la Cour a jugé que pour qu’une partie du produit puisse être protégée en tant que dessin ou modèle non enregistré, cette partie ne doit pas nécessairement être divulguée au public de manière distincte mais peut l’être dans le cadre du produit pris dans son ensemble du moment que celle-ci est clairement identifiable.

Sur la seconde question, la Cour a estimé qu’outre le fait que la partie du produit doit satisfaire aux conditions de protection énoncées par le règlement sur les dessins et modèles No.6/2002, à savoir qu’elle doit être définie par des caractéristiques comme des lignes, des contours, des couleurs, des formes et une texture, il n’y a pas de caractéristiques particulières supplémentaires à appliquer pour protéger une partie de ce produit.  

L’affaire ayant été renvoyée devant les juridictions allemandes, il leur revient désormais de rendre une décision sur cette affaire.

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Justine Salzenstein, Juriste en Propriété Industrielle – Marques, Dessins et Modèles, Novagraaf France

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